10000Visions

10, 000 Chroniques de Disques, Lives & autres.

Mercredi 25 août 2010 à 20:30

http://10000visions.cowblog.fr/images/Pochettes/hawkwindhallf.jpgHawkwind - Hall of the Mountain Grill (1974)
Par Brieuc
Avant d’officier en tant que mentor et bassiste/chanteur du génial groupe Motörhead, faut pas oublier que Ian ‘Lemmy’ Kilmister a joué de son instrument dans un groupe britannique considéré comme Prog, mais qui évoluera logiquement vers l’éléctronique puis le mouvement techno mais influencera pas mal la vague néo-psychédélique. Selon mes opinions, la meilleure période de Hawkwind se situe entre l’arrivée et le départ de Lemmy en 1975, viré parce qu’il n’était pas tellement dans le trip psychédélique du groupe.

 Nik Turner a fait pas mal d’efforts, même quand il s’est de plus en plus penché vers le planant mais n’égalera jamais ce qu’il a fait avec ses compagnons dans les premiers albums, tels que In Search of Space (1971) avec le succès commercial du 45 tours Silver Machine chanté par Lemmy en personne. Mais aussi avec le double album live prodigieux Space Ritual (1973) qui va venir immortaliser les énergiques prestations scéniques du groupe avec textes hallucinés déclamés par le poète Robert Calvert et l’auteur de science-fiction Michael Moorcock ou encore participations de la danseuse Stacia (aux seins nus, on voit du coup de quel point Lemmy est parti pour mettre maintenant des strip-teaseuses pour quelques uns de ses concerts avec Motörhead) au point d’en faire un spectacle total.

Après une légère déclination, le groupe se ressaisit très vite avec ce qui est pour moi leur meilleur album Hall of the Mountain Grill en 1974 considéré comme le meilleur album de la carrière du groupe britannique. Peut-être le plus abouti, le moins sauvage et même le plus planant du groupe. The Psychedelic Warlords donne le ton de l’album avec un Rock sauvage illuminé par le saxophone de Nik Turner. Mais ce n’est pas le meilleur s’en suivent des morceaux de différentes mentalités. Même si You’d Better Believe it reste dans la veine du premier morceau avec 7 minutes d’énergie considérable. De mon côté, le morceau qui m’a révélé Hawkwind reste et restera toujours le morceau titre, court mélancolique et atmosphérique instrumental composé par le nouveau violoniste/claviériste Simon House où une ligne de piano accrocheuse se fait accompagnée par une montée en puissance du mellotron. Incroyablement magnifique.

Wind of Change (aucun rapport avec le morceau de Scorpions) est également magnifique, un violon aérien s’échappe d’une mer de chœurs et de Mellotron pour accoucher d’un pur ovni. J’associe souvent le génial D-Rider au morceau terminant la 2e face, c'est-à-dire Paradox car les premiers accords de guitares se ressemblent énormément pour ne pas dire qu’ils sont identiques. Lemmy joue exceptionnellement de la guitare sur Lost Johnny où l’on peut déceler la puissance de Lemmy qu’il exercera par la suite dans son groupe avec sa basse imposante de ce dernier et sa voix (qui s’est métamorphosée par la suite, mais qui est très reconnaissable par moments, notamment dans ce morceau).

C’est du Rock purement cosmique, toujours planant (de courts instants comme dans le morceau Goat Willow avec l’orgue de Dave Brock), d’excellents musiciens sachant alterner leurs instruments habituels avec des claviers ou d’autres bidules pour rendre leur musique totalement unique, modifiant leurs voix et testant de nouvelles techniques, utilisant du synthétiseur récent sans faire kitsch et mettant des effets rappelant Klaus Schutze, le tout accompagné d’une batterie impressionnante de Simon King. Un disque novateur, mais pourtant discret.

Hawkwind - The Psychedelic Warlords [3:40]

Hawkwind - Wind of Change [5:08]

Hawkwind - D-Rider [6:14]

Hawkwind - Hall of the Mountain Grill [2:14]


Mercredi 11 août 2010 à 18:03

http://10000visions.cowblog.fr/images/Pochettes/BODeadManNeilYoung.jpgNeil Young - Dead Man (1995)
Par Brieuc
La bande originale Dead Man est le fruit des improvisations musicales du grand Neil Young, destinées à accompagner le film d’auteur de Jim Jarmusch ; Evocation cynique du poète William Blake - interprété par Johnny Depp aux côtés d’une panoplie de bons acteurs - dans un noir et blanc somptueux laissant court à une histoire sordide, d’une cruauté sans précédent et d’un glauque violent pourtant non-présents dans la filmographie du cinéaste.

Jim écoutait beaucoup de Crazy Horse et de Neil Young sur le tournage du film, et son fantasme reposait sur une musique de ce dernier pour donner ambiance à son œuvre. Les espoirs étaient vides, mais après visionnage d’une séquence du film, le guitariste en question a accepté sans hésitations. Ca donne la bande originale de Dead Man, renforçant son caractère mystérieux.

 En majeure partie, le contenu est représenté par six solos de guitare électrique où Neil n’y va pas de main morte sur la distorsion, allant d’une durée de 2 minutes à 14 minutes (Sachant que j’ai une grande préférence pour le 3e). Un atmosphérique solo d’orgue d’une minute trente prend place tel un fantôme, puis se fond dans un dialogue symbolisant la rencontre entre William et Nobody (pour ceux qui ont pas vu le film, c’est un Indien rendant philosophie sur la destinée de Blake, et qui est sensé réveiller son âme de poète, et le convaincre qu’il est le poète mort du même nom). Justement, la BO est surtout constituée d’interminables dialogues incroyablement bien ficelés où Neil s’immisce minutieusement avec quelques notes accrocheuses… Souvent revient les magnifiques lignes de William Blake If the Doors of Perception  were Cleansed, Everything would appear to man as it is… infinite lues par Johnny Depp en personne.

Neil Young joue de la guitare électrique, acoustique, de l’orgue et parfois du piano défectueux, parvenant à donner un style unique pour l’ambiance du film. Il pourrait jouer du biniou ou du triangle, le film aurait toujours la même beauté car Young a pigé comment le réalisateur ressentait son long-métrage et savait pertinemment comment il devait improviser sa musique, sûrement inspiré en partie par l’excellence de l’image. Jim Jarmusch et Neil Young forment un duo improbable, et cette collaboration se reproduira lors de Year of the Horse, documentaire sur la tournée du guitariste/chanteur avec les Crazy Horse, respectivement filmé par le réalisateur.

Il ne faut pas oublier que c’est le film/l’album/la musique qui m’a révélé à quel point Neil Young était grand, quand je m’étais pris une claque phénoménale propulsant Dead Man dans mes films cultes. Grâce à lui et à sa bande son, j’ai commencé à m’intéresser à Neil, qui est depuis devenu un de mes idoles.

Neil Young (with Johnny Depp) - Dead Man Theme [3:01]
 

Samedi 17 juillet 2010 à 0:13


http://10000visions.cowblog.fr/images/Pochettes/rustinpeace.jpg
Megadeth - Rust in Peace (1990)

Par Guillaume
Pour son 4e album avec son groupe Megadeth, le charismatique Dave Mustaine déterre ici l’arsenal atomique en s’offrant un line up dont la qualité ne sera égalée que très récemment depuis la conception du petit dernier Endgame. Ainsi Marty Friedman dont l’album solo Dragon’s Kiss montre la richesse mélodique et technique et  l’excellent batteur Nick Menza viennent prêter main forte au chanteur/guitariste/compositeur de génie Dave Mustaine et son talentueux compère bassiste David Elefson dont les lignes de basses judicieuses ont toujours su servir le son du groupe de Thrash Metal à la mascotte squelettique.

Jusqu’alors le fameux rêve de vengeance nourrit par Mustaine envers les zigotos de Metallica suite à son éviction n’avait pas vraiment put se matérialiser suite à sa consommation excessive de drogue (cause d’ailleurs dudit renvoi, comme quoi) qui sans l’empêcher de créer quelques bijoux ne l’aidait clairement pas à laisser libre cours à son talent, qui atteint ses sommets dans cet opus et qui restera inégalé en style tant par le groupe que par tous les autres figurants du Thrash.

Cet album est donc un joli foisonnement de soli bien pensé, complexes et mélodiques, de roulements de doubles pédales, de riffs alambiqués et destructeurs et de fills de basse à faire pâlir tout métalleux tant le groupe dévoile ici son potentiel. Chaque intro et chaque riffs apparait obligatoirement comme culte tant l’idée qui plane derrière est excellente, que ce soit de l’intro en harmoniques de Tornado of Souls au chromatisme explosif d’Holy Wars, on a à chaque fois affaire à une véritable tuerie appuyée par le chant incisif de Dave Mustaine qui paraitra même à ses détracteurs comme plus travaillé.

Bref, en ces heures de réjouissance pour le Thrash Metal, cf la réunion de l’eternel Big Four au Sonisphère, alors que le groupe sors de sa tournée des 20 ans de Rust in Peace, il est de bon ton de réécouter cet albums et ses chansons qui sont devenus des cultes du Thrash Metal, comme Hangar 18 et son duel de soli final en apothéose, Holy Wars et ses riffs à faire headbanguer n’importe quels metalhead, Tornado of Souls et son refrain légendaire ou encore Take no Prisoners et son intro dévastatrice… sans oublier  évidemment toutes les autres chansons de l’album comme Five Magics ou Rust in Peace… Polaris qui méritent leurs places dans le panthéon du Thrash Metal, aux cotés de ce groupe qui n’est malgré tout pas resté dans l’ombre de Metallica comme le ressentait Dave Mustaine et a su démontrer ses aptitudes avec des albums de cet acabit.


Megadeth - Holy Wars... The Punishment Due

Megadeth - Hangar 18


Megadeth - Take no Prisoners


Megadeth - Tornado of Souls

Lundi 12 juillet 2010 à 22:04

http://10000visions.cowblog.fr/images/Pochettes/matchingmole.jpgMatching Mole - Matching Mole (1972)
Par Brieuc
  Agacé des expérimentations vécues au sein du Soft Machine, le chanteur/batteur Robert Wyatt s’écarte de ses compères pour s’attaquer à une carrière solo à partir de 1971. Il sortait un premier album solo avant-guardiste intitulé The End of an Earn (1970) pourtant très expérimental lui aussi, voire déroutant. La nouvelle idée est donc de s’orienter vers une pop rafraichissante changeant des longs instrumentaux aventureux de Soft Machine depuis Third.

Le nouveau projet qu’il aborde avec David Sinclair - claviériste virtuose ex et futur du groupe Caravan – est un groupe clin d’œil mi-malicieux et mi-ironique à son ancien groupe : Matching Mole (Soft Machine > Machine molle > Matching Mole ; vous pigez le truc ?). Avec le duo, s’accompagne de l’ex-guitariste de Delivery Phil Miller ainsi que le bassiste Bill Mc Cormick, ancien membre de Quiet Sun.

Malgré de bonnes attentions, le premier album de 1972 va finir par prendre à contre-pied ces louables intentions pop-music en accouchant d’une musique en partie instrumentale où des improvisations prennent une grande place au gré d’un Jazz-Rock très excentrique alternant passages brillants très progs sur des passages hermétiques.

« O Caroline » donne le ton de l’album, sublime chanson d’amour traversée d’une mélodie à la magie enfantine et où David Sinclair (à qui on doit l’écriture du morceau) transporte une ligne de piano antipathique sur des textes de Robert Wyatt, écrits pour son ex-petite amie.
On découvre vite que l’ensemble est étrangement à peine moins expérimental que le premier album solo de Wyatt. Seuls deux morceaux tiennent leurs promesses, à savoir le premier que je viens de vous décrire et « Signed Curtain », réellement pop et diaphanes, mais celui-ci s’appuie sur un texte totalement absurde (« Ceci est le premier couplet… Ceci est le refrain ou peut-être est-ce un pont… on s’en fout, cela ne fait pas mal »)

Robert Wyatt force carrément sa voix en incantant des phonétiques sur le morceau « Instant Pussy » provoquant un choc quant à la première piste. Et la face 1 prend sa fin sur les 9 minutes en parti improvisées de « Part of the Dance ».

La 2e face progresse avec l’omniprésence de la guitare électrique de Phil Miller qui prend le desssus dès « Instant Kitten » pour enchaîner sur une référence directe au morceau composé par Hugh Hopper (bassiste et saxophoniste des Soft Machine) sur le volume 2 : « Dedicated to Hugh, but you weren’t Listening » renforcant encore plus le caractère progressif de la chose. Pour en arriver jusqu’à le lourd Rock Expérimental « Beer As In Braindeer »…
L’album se termine sur un « Immediate Curtain » immédiatement dominée par le mellotron presque solo, Robert Wyatt se contente d’en faire un magnifique déluge 6 minutes durant illuminées par quelques touches d’orgues.

Avant même la sortie de l’album, David Sinclair (qui intellectualise vachement la musique) se fait la malle à cause du résultat, n’étant pas à l’atteinte de ses ambitions. Il est immédiatement remplacé par Dave Mc Rae (qui jouait déjà du piano électrique sur des morceaux comme Instant Pussy, Part of the Dance ou Beer As in Braindeer).

Après ça, ils abandonnent l’idée amorcée de faire de la pop, pour enregistrer Matching’s Mole Little Red Record (produit par Robert Fripp, gratteux constant de King Crimson) qui ne révèle encore moins de pop que le précédent, voire même pas du tout. Et c’est là que se termine la brêve carrière des taupes correspondantes, laissant Robert Wyatt (qui, lassé de sa responsabilité de leader, n’écrivait d’ailleurs sur le deuxième album, que de rares pauvres textes) sur sa partie solo, intégrant Françis Monkman (ex-Curved Air), Billy Mc Cormick (du coup, ex-Matching Mole…) et le saxophoniste Gary Windo. Lors d’une fête excessivement arrosée, le 1er jour de Juin 1973, Wyatt tombe du 3e étage de l’immeuble où se déroulait l’évènement. Le clouant donc dans un fauteuil roulant, dans lequel il enregistrera - la même année - son chef-d’œuvre absolu : Rock Bottom – mais ça c’est une autre histoire.

Du moins, cet album est excessivement attachant et très émouvant par moments, le genre de rock progressif qui procure beaucoup d’émotions




Matching Mole - O Caroline [5:05]

Matching Mole - Signed Curtain [3:06]

Matching Mole - Part of the Dance [9:16]



Dimanche 23 mai 2010 à 20:25

http://1.bp.blogspot.com/_2T15FI3POt8/Sez8TZA93jI/AAAAAAAADeI/MmrdnjuILlE/s400/Moondog_Moondog.jpgMoondog - Moondog (1969)
Par Brieuc
Et bien je me lance! Louis Thomas Hardin, de son surnom Moondog était un compositeur américain alliant contemporain au classique en passant par la musique de rue, le tout bercé par un Free-Jazz sans précédent et de la World Music. Né en 1916 à Marysville dans le Kansas et mort en 1999 en Allemagne (Münster, plus précisèment).

Le grand drame de la vie de Moondog fut en 1932, année où un baton de dynamite lui explosera à la figure, et il finira aveugle pour toute sa vie. Seulement voilà, même si il était aveugle, Moondog était un musicien à l'oreille absolue, et crée des sonorités qui nous installent dans un immense confort d'écoute et surtout procure un plaisir incroyable.

Grâce aux expériences musicales et rythmiques indiennes qu'il a vécu enfant, puis aux études de musique et d'harmonie pour aveugles (où il apprendra de l'orgue, du violon et du piano), il va accèder au monde de la musique puis ira à Menphis en 1943 (grâce à une bourse). Ensuite, il vivra les 30 années suivantes de sa vie à New York. Il y rencontrera des musiciens classicos comme Leonard Bernstein et Arturo Toscanini ou encore des Jazzmans tels que Charlie Parker et Benny Goodman. Il fera aussi la rencontre de Philip Glass, ce dernier l'hébergera et lui fera connaître Terry Riley et Steve Reich, admiratifs de son travail. Mais les procédés d'Harmonie et de rythme ne plairont guère à Moondog.

Mais il va se couper peu à peu de la musique sérieuse à cause de son style vestimentaire : une grande barbe et des longs cheveux (rapprochement avec Jesus) mais aussi un costume de viking (casque, cape) inspiré par le Dieu Thor de la mythologie Scandinave. Ce style vestimentaire lui vaudra le nom de "The Viking of the 6th Avenue" (Le Viking de la 6e avenue) en 1949 (deux ans après s'être fait surnommé Moondog) dû au fait qu'il joue dans la rue, et qu'il s'installe dans les Clubs Jazz de la 6eme avenue.

Il démarre sa carrière discographique en 1953 (avec l'album Moondog & his Friends) puis continuera avec 3 albums chez Prestige (Moondog Caribea, More Moondog et The Story of Moondog) puis chez Columbia où il enregistrera ses trois meilleurs disques (à savoir celui de 1969 - dont je vous parle - et de 1971 mais aussi Moondog In Europe), puis un peu plus d'une demi-douzaine d'albums dont le fameux excellent Elpmas (1992), manifeste contre les mauvais traitements à l'encontre du peuple aborigène. Mais je vais tenter de ne pas m'attarder sur la discographie. Moondog démarrera donc sa carrière dans un aspect plus Jazz. Puis dans les années 1970, sortira 4 albums où il fera apparaître de l'orgue, et ils constitueront des pièces indispensables dans sa discographie ; les années 1980 seront plus calmes car il se consacrera à d'interminables voyages ; Enfin, Hardin terminera sa vie avec trois albums mémorables (à savoir Elpmas en 92 ainsi qu'un album de titres de Moondog revisités Sax Pax for a Sax en 94 puis Big Band en 95)

Son dernier concert sera livré dans la ville de Arles en France (le 1er jour d'Août 1999) puis un mois après, décède dans l'hôpital évangélique de Münster en Allemagne le 8 septembre 1999, laissant dérrière lui une oeuvre non très populaire mais incroyable.

(Je remercie en particulier Amaury grâce à qui j'ai pu me documenter pour faire cette biographie non très réussie car j'ai pioché des éléments un peu partout, surtout dans ses deux parties sur la vie de Moondog Prelude puis Ricercare). Enfin bon, si vous êtes interessé par Moondog, n'hésitez pas à visiter son site dédié à l'artiste pour le lien c'est ici
 


http://10000visions.cowblog.fr/images/Pochettes/MoondogMoondog.jpgC'est donc à partir de 1969 que Moondog commence à marcher commercialement (car il fut reperé par James Guercio qui bossait à CBS, à qui il avait vendu ses poèmes) avec cet album que je vais vous présenter. Cet album est donc considéré comme le chef-d'oeuvre de Moondog, mais surtout son premier véritable album. Louis Hardin dirige tout un personnel associant l'orchestre philharmonic de New York avec des musiciens Jazz. Ca donne quelque chose de magnifique, sensationnel. Un style unique appartenant bien à Moondog. Pour moi, son oeuvre de 69 réflète parfaitement bien sa personnalité et nous emporte directement dans son univers. Je m'explique, si l'on ferait écouter cet album (qui est, le disons bien, le plus accessible de sa discographie) à un gentil bonhomme ne connaissant pas le Viking de la 6e avenue, il serait tout de suite ému par la beauté et le charme de la musique d'Hardin.

Mettons que cet individu ça soit moi. C'est le premier 33T de Moondog que je me suis procuré sur ebay sous les conseils d'Amaury. J'ai tout de suite pris goût à ce curieux individu à la longue barbe. Et je me suis payé d'autres albums (comme ceux de Prestige, beaucoup moins accessibles d'écoute même si hypnotisant).

Le Theme démarre l'album, pièce originellement composée en 1952, mais finalement accompagnée par des violons, des cuivres et des percussions.

Ce n'est qu'une mise en bouche de 2 minutes et demie, car s'en suit Stamping Ground un morceau que l'on peut facilement reconnaître car il apparaît lors d'un dialogue entre Jeffrey Lebowski (Jeff Bridges) et Walter Sobchak (John Goodman) dans la magnifique bande originale de The Big Lebowski (1998) réalisé par les frêres Joël & Ethan Coen. Ce morceau est une pure merveille, un brin inquiétante, un brin réjouissante mais surtout enregistrée avec un canon magnifique. Le rythme caisse claire (surêment produit par des balais) apporte sa touche Jazz et les cordes apportent le classique. Le tout mène en progression à un unisson final digne de Moondog.

Le morceau est en D mineur, donc dans la veine du fameux  Lament I ("Bird's Lament"). Paradoxalement, qui ne connait pas Bird's Lament? Ce fabuleux morceau qui servit pour une pub France Télécom puis dans le générque de l'émission L'assiette Anglaise. Moondog a en fait écrit ce morceau en hommage à Charlie Parker, qu'il respecte énormèment. Quand sa mort fut annoncée, Hardin fut triste de l'apprendre et décida de dédier cette petite pièce mais totalement irrésistible de 1 minute 42 à Parker (d'où le Bird).
Le DJ Mr Scruff refera vivre le morceau en samplant une partie de la composition et en le mettant dans sa chanson Get a Move On.

Mais au délà de ces deux titres plutôts connus (je veux dire relativement à ce que Moondog a pu écrire à côté), il nous offre en troisième piste un mélo classique - plein de douceur et mélancolie mais surtout doté d'une précision incroyable dans le rythme des instruments - de 6 longues minutes : Symphonique # 3 (Ode to Venus) qui fut écrit en 54 (mais les codas seront rajoutées en 69).

Le disque se poursuit et la Face 1 se termine avec le joyeux et fabuleux Symphonique # 6 (Good For Goodie) qui provoque une cassure dans l'ambiance classique de la 3eme symphonie, et nous ramène vers l'ambiance musique de Rue mélée à du Jazz fusionnant classique, écrit en 1955 et dédié à Benny Goodman, clarinettiste et chef d'orchestre de Jazz américain (que Moondog a connu à New-York) où caisse claire, contrebasse et cuivres foisonnent jusqu'a créer une sorte de rythme canon décalé extremement bien réussi.

La deuxième face possède un morceau très curieux dans son découpage Minisym # 1 qui se développe en trois parties semblables à trois morceaux différents. Allegro a son rythme Trimba Moondog, qui ne change pas grand chose à ce qu'on a pu apprécier avant, car c'est toujours aussi prenant. Puis on retourne au classique avec la deuxième partie Andante Adagio puis à un mélange des deux avec Vivace. La première partie est donc Joviale, la seconde est lyrique et la troisième est vivace (avec un contre-temps du début jusqu'a la fin). Moondog jouera sur le 1er et dernier mouvement et dirigera l'orchestre sur le second. Tous les mouvements sont en 4 temps.

Wich of Endor est également un morceau composé de trois parties que Moondog a écrit pour Martha Graham (danseuse américaine innovatrice de la danse moderne). Il commence et termine en 5/4 temps. Les trois parties (Dance ; Trio ; Reprise of Dance) décrivent l'histoire de Saul. Moondog joue de la Trimba sur les sections de danses et dirige l'orchestre sur le reste de la pièce.

Enfin l'album se termine avec splendeur sur une touche classique, avec Symphonique # 1 (Portrait of a Monarch), un portrait musical de Thor le Normand, empereur de la terre. Il commence vigoureusement, impérialement puis passe sur un rythme jovial et enjoué. Une véritable réussite, qui conclut cette oeuvre incroyable et surtout très originale.

Grâce à la trimba, instrument qu'il a crée lui même - et qui n'a jamais été fabriqué car il en circule une pièce unique que seul Stefan Lakatos, disciple de Louis Hardin, possède (j'ai d'ailleurs pu le voir en jouer et la voir de près le soir du 22 Mai) , il fait harmoniser un son inimitable où la patte de Moondog est laissée. C'est là qu'on reconnaît la beauté de la musique de Moondog, dans sa Trimba. (en savoir plus sur l'instrument)

Louis Hardin n'est pas très connu, il y a des gens comme Amaury qui arrivent à le faire découvrir, mais au fond, tout le monde ne le connaît pas. Pourtant, paradoxalement, qui ne connaît pas Bird's Lament? Moondog fait partie de ces perles dont la face magnifique est eclipsée par une non-popularité alors que chacun d'entre nous connaît au moins une oeuvre de l'artiste (en l'occurence, c'est justement cet hommage à Charlie Parker). Il ne reste plus qu'a faire découvrir l'héritage musical de Louis Hardin, qui m'a fortement convaincu avec cet album. Et qui est en devenir, d'un de mes artistes préférés. Maintenant il ne vous reste plus qu'a écouter, ce que je vous encourage vivement à faire.

Moondog tente avec cet album, d'atteindre la perfection, l'harmonie parfaite, et il continuera à la chercher jusqu'en 1971 avec Moondog II qui est la suite logique de cet pièce.
 


Playlist Moondog

Moondog - Stamping Ground [2:39]

Moondog - Symphnonique # 6 (Good for a Goodie) [2:47]

Moondog - Minisym # 1 [5:46]

 (Et pour les retardataires) Moondog - Lament 1 (Bird's Lament) [1:44]
 
 

 

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