10000Visions

10, 000 Chroniques de Disques, Lives & autres.

Jeudi 22 avril 2010 à 12:00

http://10000visions.cowblog.fr/images/PinkFloyd/darkside.jpgPink Floyd - Dark side of the Moon (1973)
Par Brieuc
Dès la fin de 1971, l'idée principale discutée dans les cuisines de Nick (et non en studio ou tournées), est de construire en six semaines un album divers et varié d'une longueur convenable afin de combler la moitié d'un show. Se concentrant sur les pressions que le groupe subissait en tournée, ils décident de développer un concept autour de la violence, des problèmes sociaux, de la religion (reflétant l'Amérique) qui serait un témoignage de ce qu'ils ont pu expérimenter en tournée Américaine par exemple... Le thème de la folie est vaguement cité puis clairement exploité par Waters qui fournira 100% des paroles plus éclairées que jamais. En quelques semaines, les Floyd pondèrent une première version jouable qui sera interprétée pour la 1ère fois dans le Rainbow Theatre de Londres : Dark Side of the Moon, A Piece for Assorted Lunatics ou Eclipse. L'enregistrement de l'album s'étalera sur toute l'année 1972 avant de déborder sur 1973, interrompu par les tournées anglaises, japonaises, Nord-Américaine pour terminer par l'Europe jusqu'en décembre (qui ont vu l'arrivée de la nouvelle forte tête en guise d'éclairagiste, Arthur Max), mais aussi la sortie de Live At Pompéi, les quelques ballets de Roland Petit ou plus principalement la pause Obscured by Clouds pour la bande originale de La Vallée de Barbet Shroeder (seconde collaboration après More).
 
Le très talentueux Alan Parsons est confié comme Ingénieur du son pour les premiers enregistrements de Dark Side qui avait déjà travaillé comme technicien sur Atom Heart Mother (1970).
 
Le disque le plus culte de la planète progressive est ouvert par Nick Mason sur Speak to me. Elle fut construite à partir de fondus enchaînés de tous les autres morceaux de l'album qu'il réunissait chez lui avant de les assembler en studio. Après avoir tenté de produire des battements de cœur à partir d'enregistrements médicaux, le groupe décida de s'en tenir aux instruments de musique car les résultats finaux étaient stressants et il s'agissait d'envelopper l'auditeur dans un confort d'écoute sans précédent et de le détendre. Ils utilisèrent donc une mailloche très douce sur une grosse caisse renforcée pour l'imiter. Le son leur semblait beaucoup plus réaliste, mais pas autant que le rythme du coup plutôt inquiétant (parce que 72 battements par minute étaient trop rapides). On entend des ébauches des propos enregistrés et ses quelques rires, le tiroir-caisse, l'horloge, ou encore les cris de Clare Torry qui s'étire sur l'enchaînement par la seconde piste par une note de piano à la pédale forte passée à l'envers pour la transition avec Breathe.
 
C'est sur ce second morceau que la nouvelle dimension musicale est révélée, le résultat d'une expérience qui consistait à réutiliser la même mélodie pour deux chansons, ou, plus précisément, à insérer deux sections complètement différentes au milieu de deux couplets, afin que la mélodie reprenne après les deux compositions suivantes. David Gilmour nous envoûte déjà avec sa guitare -, la lap-steel nous fait rêver - avant de chanter des textes qui fascinent encore son auteur, Roger Waters s'étonne d'avoir écrit des choses du genre Respire, respire l'air, n'aie pas peur de t'en soucier mais le tout est simplement magnifique. Les accords du Fender à la fin sont inspirés voire identiques à ceux de Kind of Blue de Miles Davis selon Rick Wright lui-même.
 
La machine est lancée aussitôt et on ne peut plus s'arrêter, On the Run est le résultat d'une accélération fulgurante de sons produits sur un EMS SynthiA (qui remplaçait le VCS3 conçu par Peter Zinovieff) rappelant un diagramme accompagnée par des bruitages de pas puisés dans la sonothèque d'EMI, et autres (rire, avion) et d'effets cosmiques qui font son charme. Elle fut ajoutée in extremis à l'enregistrement de l'album, retravaillée à partir d'une transition instrumentale de la version live. Les premiers shows de la tournée pré-sortie se firent sans synthétiseurs et donnaient une simple improvisation pour clavier et guitare conclue par une explosion et une cacophonie d'effet sonores, parfois intitulée The Travel Sequence.
 
Quand on passe à Time, on se remet de nos émotions premières avant d'être surpris par toutes les horloges sonnant issus d'une démo d'enregistrement quadriphonique qu'Alan Parson avait réalisée quelques mois auparavant. Il avait enregistré toutes sortes de carillons, tic-tac et sonneries de réveils trouvés dans une horlogerie ancienne. S'en suit toute cette partie fascinante où Nick frappe ses rototoms avant de passer à ses couplets, son refrain et ses étonnants riffs pour terminer sur une reprise de Breathe qui clôture ce qu'on pourrait appeler les 7 minutes les plus intenses d'un album qui ne l'est pas moins. C'est là aussi qu'on découvre que le groupe a décidé de se ré-équiper d'accompagnateurs malgré l'expérience laborieuse de l'orchestre et du choeur sur Atom Heart Mother, à savoir les chroristes Doris Troy, Leslie Duncan, Liza Strike et Barry St John assurant les choeurs. Mais aussi Clare qui fera ses prouesses sur le prochain morceau.
 
Enfin The Great Gig in the Sky, le chef-d'oeuvre de Richard, termine la face A de celui-ci. Une ligne de piano vraiment magnifique sur laquelle se pose une partie vocale assurée par Clare Torry (recommandée par Alan qui avait déjà travaillé avec elle), qui faisait de la pure improvisation. On lui demanda de chanter à la mort et à l'horreur et se lâcha en studio avant d'aller s'excuser auprès de l'équipe dans la cabine qui était pourtant ravie. On peut réentendre les entretiens fondus dans des mélodies à la tonalité variable où tantôt Rick pianote seul (ou presque) ou tous les musiciens se lâchent. Aussi appelée The Mortality Sequence chez les fans quand elle avait été popularisée également dans les premiers lives qui était un solo de piano électronique sur fond d'enregistrements sur bandes magnétiques qui distillaient des extraits de l'épître aux Ephésiens, le Notre père ou autres textes bibliques superposés à des propos de Malcom Muggeridge (une personnalité controversée de la radio en pleine crise)
 
Petite parenthèse sur la provenance des bribes de conversations présentes sur les 30 minutes du disque : c'est un concept suggéré par Roger qui proposait d'intégrer des bouts de dialogues ressortant de questions sur la violence, la folie et la mortalité recopiées sur des cartes et placées devant des pupitres. Le personnel ne faisant pas partie du groupe, ainsi que des gens comme Paul et Linda Mc Cartney (qui enregistraient Red Rose Speedway avec les Wings), l'épouse de Peter Watt et du régisseur Chris Adamson, le technicien Roger The Hat - qui leur a fait taper de bonnes barres au groupe par son entretien apparemment mémorable selon Nick – furent invités pour répondre à ces questions devant un micro... et seront ajoutés la veille de l'enregistrement final même si tout n'a pas pu être retenu. Nous reviendrons sur le gagnant des interviews dans les dernières secondes du disque.
 
La face B est tout de suite révélatrice d'un succès phénoménal au hit-parade, avec le tube Money en 7/8 qui impose ses paroles Watersiennes anti-capitalistes plutôt paradoxales vu son succès. Sa renommée est surtout dûe à un bruitage assez familier en début de morceau de leimotiv. Nick et Roger avaient eux-mêmes réalisés le concept : Nick avait percé de vieilles pièces de monnaie et les avait ficelées, son compère les a ensuite jetées dans un pot de poterie qu'utilisait sa femme de l'époque Judy Waters et enregistra le résultat. L'effet papier déchiré ont simplement été crées dans un micro et les caisses enregistreuses proviennent encore une fois de la fameuse sonothèque du stuio. Classique morceau, mais plutôt lassant à force d'écoute Avant l'accélération du rythme, on entend en plein morceau un fabuleux solo de saxophone du futur fidèle Dick Parry qui livre sa première interprétation au sein du Floyd qui annonce pas loin de 40 ans de collaboration.
 
Il refait vibrer son saxo ténor pour la suivante et livre un deuxième solo beaucoup plus langoureux, sur le morceau lyrique crée par Rick (Us and Them, ressuscité des séances de travail de Zabriskie Point). Comme je l'ai déjà dit sur Meddle, la musique était selon Rick « l'espace entre les notes » ce qu'il annonçait déjà sur le sonar d'Echoes. Vértiable pause, havre de paix qui casse le message écœurant de son tube précédent. Il éclate soudainement comme dans sa composition sur AHM Summer '68. La transition avec l'instrumental Any Colour you Like qui apporte une note d'apaisement avant son époustouflant final, Rick pianote un synthé EMS pendant que David joue de sa Stratocaster au son modifié.
 
Roger Waters s'empare du chant pour les deux morceaux finals, sûrement parce qu'ils lui sont adaptés et qu'il en a écrit les plus profondes paroles. Son but est d'écrire purement ces idées. Roger les ayant écrites intégralement figurera pour la première fois sur le gatefold comme parolier. Certains disent qu'il l'a fait sans l'accord du groupe, mais la version de Nick expliquant qu'ils leur semblait judicieux de lui donner ce titre me semble bien plus crédible. La premiere étant une de ses grandes compositions, Brain Damage, où la guitare prend une très grande place en soutenant les célèbres paroles de son chanteur The Lunatic is on the Grass, the lunatic is in my head […] I see you on the dark side of the moon voulant critiquer des aspects de la société qu'il ne comprend pas (un exemple, traditionnel à son Pays, le fait que l'on veuille conçevoir une splendide pelouse en se disant que personne n'aura le droit de mettre le pied dessus, ni aucun enfant ne pourra y jouer). Pour passer à Eclipse, qui s'est améliorée au fil des concerts. Incroyable final qui inscrit le parfait de cet album, jusqu'à la dernière parole But the Sun is eclipsed by the moooon. Les battements de coeur reviennent, et c'est le concierge irlandais d'Abbey Road Gerry O'Driscoll qui aura le privilège de sceller l'œuvre avec une bribe de ses propos avec la phrase There is no dark side of the moon. Matter of fact, it's all dark (la lune n'a pas de face cachée, en fait elle est toute noire) qui donneront le titre définitif de l'album. Qui malgré le fait que Medicine Head ait sorti un album du même nom au moment ou les Floyd y pensaient déjà, fera surface alors qu'ils songeaient à le nommer Eclipse.
 
C'est sur ce vide sonore que se termine le disque sorti le Vendredi 23 Mars 1973 sous les traits d'un faisceau de lumière blanche et un spectre chromatique se déployant à partir du prisme légendaire central, conçu encore une fois par Storm Thogerson et Aubrey Powell d'Hipgnosis qui représente bel et bien la pureté et la diversité de la musique, : propre, simple et percutante. L'Artwork suivra le matériel publicitaire lorsqu'il s'agira de faire de la promo (pyramides de Guizèh). Le gatefold suit de son côté l'idée cardiaque, avec l'électrocardiogramme coloré encadrant les sublimes paroles. Le disque prendra évidemment une tournure très commerciale. Dans un premier temps avec un single Money/Us and them verra le jour le 7 Mai, un record battu dans les Charts (724 semaines dans le top 200 des meilleurs ventes de disques américaines.. le 30 Avril 1988 le phénomène ce cessant) puis les beaufs qui voulaient épater leurs copains en testant le disque sur leur chaîne stéréo (ou encore Speak to Me servant à tester les radios du monde entier) et maintenant les jeunots pas plus fans que ça du Floyd arborant le prisme sans trop savoir ce qu'il représente à part l'esthétisme de la chose.. (écoutez bien mon âme d'intolérant, mais j'exagère un peu c'est vrai, bref.). Sûrement le plus accessible des anglais, mais surtout un des plus collectifs de leur discographie ou celui où ils ont définitivement brisé leur tournure psychédélique qui disparaissait depuis Atom Heart Mother pour servir un Space-Rock cosmique et progressif, qui fascine toujours autant malgré le bientôt quarantième anniversaire de la création de ce monument.

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FACE A
1. Speak to Me (Nick Mason) - 1:08
2. Breathe (David Gilmour, Roger Waters, Rick Wright) - 2:49
3. On the Run (David Gilmour, Roger Waters) - 3:30
4. Time / Breathe Reprise (David Gilmour, Roger Waters, Rick Wright, Nick Mason) - 7:06
5. The Great Gig in the Sky (Clare Torry, Rick Wright) - 4:44
FACE B
6. Money (Roger Waters) - 6:22
7. Us and Them (Rick Wright, Roger Waters) - 7:50
8. Any Colour you Like (David Gilmour, Rick Wright, Nick Mason) - 3:26
9. Brain Damage (Roger Waters) - 3:50 
10. Eclipse (Roger Waters - 2:08

1973, 33t anglais : Harvest SHVL 804
1973, 33t français : Harvest SHVL 804
1973, 33t anglais (quadraphonique) : Harvest Q4 SHVL 804
1973, 33t américain : Harvest SMAS 11163
1984, CD anglais : EMI CDP 7 46001 2
1994, CD anglais (remasterisé) : EMI 8 297522
2003, SACD : EMI 7243 582136 2 1
2003, 33t : EMI



Pour aller plus loin, le documentaire de la collection classic album disponible ici ou écouter la première version de l'album sur The Dark Side Reharsals


Jeudi 25 février 2010 à 11:32

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Jethro Tull - Aqualung (1971)
Par Brieuc
Jethro Tull était et reste encore une bande de chevelus du rock progressif, décrivant certains aspects de la société, comme l’hypocrisie ou l’avarice tout en dénonçant la religion organisée (sectes). A l’époque, il était composé du grand Ian Anderson : chanteur, flûtiste (traversière) et guitariste acoustique (un grand artiste complet en somme, sans qui Jethro Tull ne serait pas grand-chose) ainsi que Martin Barre aux guitares électriques, John Evan aux claviers (Orgue, Piano, Mellotron), Jeffrey Hammond à la basse et Clive Bunker à la batterie.

La musique de Jethro Tull, est d’alterner des mélodies Folk avec des sonorités médiévales tout en la rendant progressive. Elle caractérise surtout par un point : les solos de flûte traversières que nous offrent Ian Anderson en plein morceau, ce qui nous rappelle vaguement les débuts de King Crimson.

Après Stand Up (1969) qui est un très bon album que j’ai hésité à vous chroniquer (car il contient de bons titres comme le classique de Jethro Tull : « Bourée ») et Benefit (1970) qui restent tous les deux dans un répertoire marqué par les origines Blues du groupe, apparaît en 1971, Aqualung. Et là, le groupe va carrément devenir un des leaders du rock populaire en ce début de décennie, alors que la concurrence est particulièrement rude.

L’album est composé en deux parties à savoir Aqualung puis My God. Ma préférée reste toujours la première. Non seulement pour ses titres différents et originaux des uns des autres. Comme le titre ouvrant l’œuvre, au titre éponyme de l’album : Aqualung, qui démarre durement par des sonorités Hard-Rock dues aux riffs de guitare de Martin Barre. Mais si on ne se fie qu’a la première minute, on n’entend pas le véritable esprit du morceau. C’est dès le 2e minute que le rythme change, et on tombe sur une ballade Guitare Acoustique/Piano où Ian Anderson murmure des paroles dans une sorte de mégaphone. Puis à la 3e minute, on passe à du vrai Jethro Tull, mélangeant les styles différents des deux premières minutes. Et le morceau dure 6 minutes trente. On nous offre un solo de guitare électrique. Dans les deux dernières minutes, on retrouve les mêmes mélodies que les deux premières mais inversées. Le morceau termine donc sur une touche ballade puis sur une touche Hard-Rock. On peut donc remarquer sa structure.

Mais la meilleure de l’album reste le second morceau Cross-Eyed Mary, qui démarre par une intro limite inquiétante par ses montées magnifiques de flûtes traversières pendant une minute. Et on passe à un génial rock digne du Tull puis un excellent solo de flûte traversière suivit d’un solo de guitare. Leur morceau le plus construit et le plus recherché musicalement

Puis après une joyeuse petite ballade Folk (Cheap Day Return) on a un morceau toujours joyeux Folk, Mother Goose mais cette-fois ci caractérisée par sa Flûte traversière omniprésente, Wond’ring Aloud toujours dans la même lignée mais sans la flûte. Et on termine la face, avec le morceau le plus jouissif de l’album réunissant Médiéval, Folk, Hard Rock avec solos de Martin Barre et de Ian Anderson à la flûte : « Up To Me » qui résume le plus le style de l’album. La première face est nettement meilleure que la deuxième, mais cela ne veut pas dire que la deuxième est mauvaise. Au contraire « My God » est très baroque voire même plus ambitieux.

Le premier morceau de la face My God est découpé comme  Cross-Eyed Mary, mais je préfère cette dernière. Même si la flûte, la guitare (façon Led Zeppelin) et le piano y sont sublimes. Puis passe à une partie quelque peu instrumentale accompagné par un cœur qualifiant son style de baroque, servant de décors à la partie flutiste. Avant qu’Ian se remette à chanter avec le style Hard du milieu de la chanson.

Très rock, très entraînant et très électrique : Hymn 43, change le genre, et finit en Crescendo. Puis après une courte ballade Folk (SlipStream), on repasse à du rock éclectique avec Locomotive Breath, un tube aux Etats-Unis. On finit l’album avec un morceau créant de manière talentueuse, un épilogue voire même une synthèse de l’album. Wind Up montrant que le groupe est dans une inspiration de tous les instants, combinant toutes les influences du groupe.

Mais cette voix ! Celle, presque nasillarde d’Ian Anderson, clamant des textes, qui se font particulièrement incisifs, riches et percutants, évoquant l’histoire d’un clochard exhibitionniste ou adressant une critique aussi féroce que judicieuse à la religion organisée et ses malsaines hypocrisies.

Ce dernier thème nourrit en fait l’essentiel du propos des 5 derniers morceaux. Certains s’empressent alors, de qualifier Aqualung (au grand dam d’Anderson), de considérer cet album comme concept qu’il ne l’est évidemment pas. Le flûtiste/chanteur écrira alors un vrai, un long, gonflé d’ambition et de complexité musicale. Thick As A Brick, un excellent album composé de deux morceaux, se traduisant par « Bête comme ses pieds ».

Quand Progressif et Médiéval font bon ménage.




Jethro Tull - Aqualung [6:37]

Jethro Tull - Cross-Eyed Mary [4:09]

Jethro Tull - Up To Me [3:15]

Vendredi 19 février 2010 à 18:54

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Neil Young - Tonight's The Night (1975)
Par Brieuc
Il y a certains artistes, que j'aime encore plus chaque jour passant. On peut compter les Pink Floyd, King Crimson, Yes mais surtout Neil Young. Il a une de ces capacités, à faire des choses différentes, changer d'humeur, de style, de voix (même si elle reste exceptionnelle à l'oreille). Ce qui donne un registre audible par tout le monde, et personne pourrait rejeter un bon vieux 33 T du old-school Neil.

"Tonight's the Night" est le sixième album solo du grand Neil, il a été enregistré à Reprise Records (sa bonne vieille maison de disques) en 1975. Après enchaîné les succès de "After the Gold Rush" ou encore "Harvest" puis après le live "Time Fades Away" issu de la tournée du même nom, la sortie de l'album "On the Beach" est remplacée par "Tonight's the night"

Mais Tonight's the night est de loin, l'album le plus noir, le plus sombre et le plus triste de Neil Young. C'est justement ce qui donne son charme. En 1974, Neil Young est choqué par la mort du guitariste de son groupe (Crazy Horse) Danny Whitten, décédé d'une overdose.
Pour la petite histoire, Neil Young savait que Danny ne serait pas bon pour la prochaine tournée qu'il organisait. Il lui a donc donné un billet de 50 dollars, pour qu'il puisse rentrer chez lui par avion. Danny achète avec cet argent, de la drogue qui le conduira à la morgue.
Comme si ça ne suffisait pas, le roadie de Neil, Bruce Berry décède d'une overdose d'héroïne dans la même période.

Perdant deux membres de son équipe, Neil Percival Young décide d'enregistrer un album à leur mémoire, pour leur rendre hommage. Il décide de nommer son album "Tonight's the Night".

En référence au morceau en deux parties "Tonight's the Night" qui se situent au début et à la fin de l'album tels "My My Hey Hey" et "Hey Hey My My" dans l'album "Rust Never Sleeps".Elle est exceptionnellement en hommage à Bruce Berry. On le remarque par ses paroles "Bruce Berry was a Working Man, He use to load Econoline Van. A Sparkle was in his eyes, But his Life was in his hands" ("Bruce Berry était un travailleur était un travailleur, il chargeait son fourgon Econoline, une étincelle était dans ses yeux, mais sa vie était dans ses mains")
Ce morceau est joué au piano par Neil Young (car non seulement d'être un brillant harmoniciste, chanteur et guitariste, c'est un brillant pianiste) accompagné par une collaboration des Crazy Horse (avec à la basse Billy Talbot et aussi Ralph Molina à la batterie).
Ces deux parties quelques peu progressives, sont réunies en une chanson, avec cette expression qui demeura dans la légende de Neil Young

J'accroche encore plus avec les morceaux suivants : "Speakin Out" où Neil Young continue à maîtriser le piano, puis on enchaîne avec "World on a String" plus dans le style Crazy Horse dans la continuité des guitares. 
Mais après la magnifique "Borrowed Tune" où Neil joue en solo, du piano tout en chantant puis en jouant de l'harmonica : "Come On Baby Let's go Downtown" morceau spécialement dédié à Danny Whitten. Elle est extraite d'un live au Filmore East, où jouaient les Crazy Horse (Ralph Molina, Bill Talbot...) et Danny Whitten y chante. J'aime beaucoup ce morceau pour son esprit Grateful Dead. Car, cette prestation et cette musique me font extremement penser à celles qu'offraient les Grateful Dead lors de leur passage au Filmore West, jouant "St Stephen". La structure musicale et les choeurs sont presques les mêmes. Et la voix de Danny Whitten, passant après celle de Neil est carrêment géniale. Il tire sur ses cordes vocales et chante grave.

A partir de ce morceau, l'album prend une nouvelle dimension, et la face 2 contient plusieurs morceaux qui ont chacun un esprit ou un registre différent. Juste après ce morceau, on a "Mellow My Mind", magnifique morceau où Neil peine à souffler dans son harmonica et à chanter. Il se trompe, il va trop dans les aïgus et il est fatigué comme je ne sais quoi. Je pense plus particulièrement, au passage de 1 minute et 12, 13 secondes, où Neil se casse royalement la gueule, en essayant de chanter le refrain au plus haut. Ca fait rire, mais au fond c'est horrible. "Mellow My Mind", qui est dans un registre plus Harvestien (ex :Heart Of Gold), est le morceau qui représente le plus la peine et la tristesse qu'a ressenti Neil, lors de l'enregistrement de son album.

Le morceau suivant est "Roll Another Number (For the Road)", plus dans un registre Country style "Are You Ready For the Country?". Le genre de morceaux, dont je ne suis pas particulièrement fan, mais c'est toujours un plaisir d'en entendre un du genre.
Puis on enchaîne avec ma préférée de l'album : "Albuquerque", au nom quelque peu horrible, mais au contenu magnifique, sorte de mélange entre les solos de Dead Man avec Lapstyles et une touche d'Harvest.

Je ne vais pas m'étendre sur des années lumières, mais les morceaux qui suivent sont tous différents. On a la ballade intimiste ("New Mama"), le Rock Crazy Horsien ("Lookout Joe"), et une veine classique ("Tired Eyes") puis on termine comme je l'ai décrit au début de l'article, avec la deuxième partie de Tonight's the Night.

Cet album de 12 pistes pistes est exceptionnel. Car il montre une face cachée de Neil Young : Triste, Obnubilé, abattu, fatigué, à la limite de la non-chalance (c'est d'ailleurs pourquoi la maison de disque a d'abord refusé que l'album paraisse, pour ne pas déçevoir les fans). Avec le peu d'énergie qui lui reste, Neil Young tente d'atténuer le choc qu'il a eu en apprenant la mort de ses deux coéquipiers. Et essaye de combler le vide, et leur rendre hommage par la musique. Chaque fois que Neil prononce une parole, souffle dans son harmonica, on l'impression qu'il va s'effondrer, s'écraser, s'étaler par terre... Mais c'est justement ce qui fait le charme sombre de cet album, qui n'est pas une tache dans la carrière de Neil, comme diraient certains. Les quelques ballades qui ornent l'album essayent de cacher un peu la tristesse de l'artiste canadien portant le deuil de ses camarades. Mais rien y fait, l'album est sordide mais magnifique.

Un des albums les plus sombres de l'histoire du rock



Neil Young - Tonight's the Night (Part One) [4:43]

Neil Young & Crazy Horse - Come On Baby Let's Go Downtown (Live) [3:36]

Neil Young - Mellow My Mind [3:08]

Neil Young - Albuquerque [4:02]



Jeudi 28 janvier 2010 à 21:17

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Emerson, Lake & Palmer - Tarkus (1971)
 
Par Brieuc
Mes Chers Amis, comme promis le blog continue et continuera jusqu'au plus loin possible (du moins, mon compère et moi l'ésperons). J'aimerais commencer cette année 2010 avec un groupe que je ne connaissais pas très bien mais il était obligé que je vous en parle.
Il s'agit d'un trio, non pas Crosby, Stills & Nash mais le fameux Emerson, Lake & Palmer.

Nous sommes en 1969 à San Francisco dans le Filmore West. En ce jour, The Nice et King Crimson se partagent l'affiche. Greg Lake, le premier bassiste-chanteur de King Crimson rencontre Keith Emerson, qui lui est le clavieriste de The Nice. Emsemble, ils imaginent déjà une collaboration future, un duo. Celle-ci prend forme l'année suivante, en effet les deux musiciens se réunnisent et cherchent un batteur : Ginger Baker (Cream) ou encore Mitch Mitchell (The Jimi Hendrix Experience) ont auditionné, mais la légende est restée gravée au sein des baguettes du jeune batteur des Crazy World of Arthur Brown puis d'Atomic Rooster : Carl Palmer. Le trio est formé et sortent un premier album en 1970 sobrement appelé de manière éponyme au nom de leur groupe. Jimi Hendrix s'est interessé à ceux que faisaient le trio britannique au point même qu'il envisagea d'être leur guitariste (imaginez ça). Les journalistes fantasmaient donc sur un éventuel quatuor appelé HELP (Hendrix, Emerson, Lake & Palmer), ça aurait dépoté mais en fait non ça s'est pas fait.

En 1971, ils sortent la perle de leur carrière Tarkus album à la pochette très kitsch et à la musique très kitsch aussi. Si vous possedez un jour le vynil, n'ouvrez surtout pas le Gatefold, un des plus affreux qu'on puissent voir. L'album relate l'histoire d'un rapace hérisson tank appelé le Tarkus, né d'une éruption dans un volcan. Il terrasse tous les affreux mi-monstres-mi-dinos-mi-animaux-mi-humains-mi-robots
Malgré cette pochette de mauvais goût et cette histoire carrêment affligeante, le contenu de l'album s'avère délicieux.
A commencer par la 1ere face, qui contient un seul morceau TARKUS découpé en plusieurs morceaux non très visibles par leur transition impeccable ne donnant aucun signe de changement. Ce qui est bizarre dans ce morceau, c'est qu'on passe d'une partie à l'autre de deux styles différents... je m'explique : On commence par exemple avec un morceau apocalyptique assez pompier puis on passe à une merveille, apocalyptique, merveille ect... Ce qui donne un morceau d'une vingtaine de minutes quelque peu illégale qui contient trois merveilles dûs à la voix de Greg Lake et 4 apocalypses dûs à la puissance du clavier d'Emerson.

Eruption
démarre le morceau bien dans le style de E.L.P avec claviers à mi chemin entre insupportable et excellents de Emerson. Il symbolise la naissance du Tarkus, né d'une eruption de volcan, qui provoque l'éclosion de son Oeuf. Stone Of Years est sensationnelle, elle enchaîne Eruption avec brio, et on se concentre plus sur la basse/batterie, car Emerson ne nous fait pas part de ses galipettes sur ses claviers mais se contente de quelques gammes. Mais surtout Greg Lake avec sa voix me faisant écho à In the Court of the Crimson King, ceci donnant une beauté sensationelle au morceau. Rhhhhaaaa quel gâchis, on passe de Stone of Years à l'Iconoclast qui lui est pas très long mais très pompant. Mais non surprise! Mass revient (2eme morceau merveilleux) avec ses airs à la Hendrix mélangé à du KC, qui enchaîne sur des sortes de Whahaa que nous joue avec puissance Emerson, suivant la voix de Lake. Manticore est le morceau suivant avec lequel j'ai beaucoup de mal car il reprend l'aspect acopalyptique qui disparaît en fondu à l'apparition du fabuleux Battlefield 3 minutes de pur bohneur mélangeant cette fois ci toujours du KC mais avec du Pink Floyd (grâce à la guitare de Greg Lake faisant penser aux intenses solos de David Gilmour). Elle fait penser à des rémiscences aux pompes funêbres. On termine mal malheureusement avec Aquatarkus qui reprend le thème du début, un style qu'il faut apprécier, mais que moi-même j'ai du mal à apprécier. Tarkus est donc un morceau inégal, passant en fonction des parties (1 fois sur deux) du merveilleux à l'apocalyptique. 

La deuxième face n'a plus rien à voir avec la 1ere. On peut compter le honky-tonk Jeremy Bender et surtout les superbes The Only Way, Infinity Space mais surtout A Time and a Place morceau où semble condensée toute l'énergie du trio afin qu'il puisse trouver son équilibre. Surprise qu'est, le dernier morceau de l'album est Are You Ready Eddy? clin d'oeil à l'ingénieur du son des E.L.P le fameux Eddie Offord. Le piano fou d'Emerson cherche au fin fond d'un tiroir des ambiances rock'n'roll bourrain à la Chuck Berry. Ce qui donne un morceau non du tout progressif mais qui prouve comme le dit si bien Mr Prog "Qu'ils savaient déconner en studio".

La musique de E.L.P se caractèrise surtout par les solos infernaux de Keith Emerson, et sa continuité de rouler sur le claver synthétiseur mélant du YES à du Alan's Parsons Project par l'utilisation de différents claviers, comme le Moog, l'orgue Hammond ou encore l'orgue d'église. La basse, la guitare acoustisque et électrique et la fabuleuse voix de Greg Lake, qui est pour moi le meilleur chanteur-bassiste que King Crimson, mieux que Boz, John Wetton et Gordon Askell réunis. Il a prouvé son talent surtout dans le premier opus de KC dont je vous ai tant parlé. Et enfin le virtuose Carl Palmer, qui joue très bien mais son jeu est quelque peu caché par les claviers de son collègue.

N°1 en Angleterre et n°9 aux States, "Tarkus" confirme le statut commercial des Emerson, Lake & Palmer sur la planète Progressive/Pop en ce début des années 1970.

D'autres albums des E.L.P sont plutôt renommés tels que Brain Salad Surgery, Pictures at an Exhibition ou encore le fameux Trilogy à la pochette ultra culte. Mais cet album est très satisfaisant, interessant à écouter, à analyser... reste la pochette avec son gatefold affreux mais ça c'est un détail parmis tant d'autres. Ce n'est mes amis, que le début du spectacle des Progueux Keith Emerson, Greg Lake et Carl Palmer... Progressif oui mais plus kitsch tu meurs.



Playlist "Tarkus"

Emerson, Lake & Palmer - Stone of Years (Tarkus) [3:45]

Emerson, Lake & Palmer - Mass (Tarkus) [3:12]

Emerson, Lake & Palmer - Battlefield (Tarkus) [3:52]

Emerson, Lake & Palmer - Jeremy Bender [1:50]


Mardi 29 décembre 2009 à 23:21

http://10000visions.cowblog.fr/images/Pochettes/YesFragile.jpg Yes - Fragile (1972)
Par Guillaume
Ce 4ème  opus du groupe britannique pourrait bien être leur meilleur car il bénéficie de nombreux avantages outre le fait qu'il ait rencontré un fort succès commercial, à savoir: le talent du claviériste Rick Wakeman, une intensité lyrique qu'on retrouve difficilement ou amoindris dans les autres albums et une fraicheur qu'on aimerait bien voir plus fréquente dans le rock progressif.
L'album est parsemé "de performances personnelles" censée mettre en avant le talent de chaque musiciens... disons qu'en gros, The Fish de Chris Squire (basse) et Mood for a Day de Steve Howe (guitare) arrivent a se hisser au dessus des autres grâce a leur géniale inventivité (superposition de motifs Rickenbacker pour l'un et flamenco endiablé pour l'autre).
A part ca, We have Heaven de John Anderson est insuportable par sa superposition de niaiseries vocales, Five per cent Nothing du batteur Bill Bruford ne sert à rien et l'arrangement de Brahms par Rick Wakeman me rappelle vaguement les kitch musiques classique d'Orange Mécanique (ce qui n'est pas forcément négatif, mais bon). En fait une fois qu'on a passé ca il nous reste trois chansons principales, qui sont des classiques de Yes par excellence.
L'album s'ouvre en fait par Roundabout (le rond point), qui malgré une stupidité de paroles voulue nous offre une superbe intro de guitare en harmoniques comme Steve Howe en raffole et une ligne de basse bien sympathique ainsi qu'un refrain entêtant et captivant à qui on doit surement le succès de la chanson.
Les deux autres chansons sont South Side of the Sky (et ses choeurs de lalalala assez planant) et Heart of the Sunrise qui comptent dans les chansons les plus rock de Yes, surtout Heart of the Sunrise qui s'ouvre par une intro menée a tambour battant par la Rickenbacker de Chris Squire qui est plus grasse et lourde que jamais. C'est en fait dans cet chanson que réside toute l'intensité de l'album, libérée par les éclats lyrique de John Anderson qui nous fait osciller entre du rock style Deep Purple (la basse de Chris Squire y est pour beaucoup, vu que c'est un peu lui et Steve Howe qui donnent un son rock à Yes) et une ballade lente et prenante grâce à une voix aigüe et agréable, ce qui n'est d'ailleurs pas toujours le cas.
Bref, cet album est relativement court, frais et très agréable à écouter, alors certes il est moins technique que les excellents Relayer et Close to the Edge mais il est beaucoup moins prise de tête et on sent les musiciens s'amuser, ce que nous avons d'ailleurs pu voir en live.



Playlist "Fragile"

Yes - Roundabout [8:30]
                                                          
Yes - South Side of the Sky [8:02]
                                                          
Yes - The Fish (Schindleria Praematurus) [2:39]
                                                                    
Yes - Heart of the Sunrise [11:27]


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